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Tidjane Thiam, la nouvelle cible de Gnamien Konan

Aprnews - Tidjane Thiam, la nouvelle cible de Gnamien Konan - Actualité - Côte d'Ivoire
Mercredi, 18 novembre 2020

Tidjane Thiam, la nouvelle cible de Gnamien Konan

Parce que la politique est un rapport de force, l’insulte reste une arme redoutable dans la conquête du pouvoir. C’est du moins la ferme conviction de Gnamien Konan qui, de plus en plus, montre une aptitude à diriger une chaire d’injurologie.

Gnamien Konan est réellement passé maître dans la poésie de l’invective, préférant à une discussion argumentée, un effet de manche par une grossièreté ou un gros mot. Cet art de l’insulte, cher à Arthur Schopenhauer, était en vérité, et le philosophe en était conscient, une adresse singulière à esquiver le débat et la réflexion. L’ex dg des Douanes s’en sert, lui- aussi, comme d’un bouclier pour masquer ses insuffisances discursives, pour habiller son inaptitude à l’art du débat constructif. L’homme est encore et toujours dans l’insulte et le mépris de l’autre. En effet, déjà, alors qu’il était ministre de l’enseignement supérieur, Gnamien Konan s’était fendu d’un malheureux propos du genre : « les disciplines des lettres et sciences humaines n’étaient d’aucune importance et pouvaient même être supprimées ».

Point n’est réellement besoin de s’attarder sur ces offenses, car cette incapacité à la courtoisie de la controverse fut très vite mise en évidence par les universitaires ivoiriens qui lui ont retorqué que les arts et les lettres, contrairement à ce qu’il peut penser, sont le fondement de l’humanité, elles seules donnent aux hommes de la verticalité et que la culture constitue l’essence de l’homme. Dès lors, on le croyait définitivement instruit de cette mise au point des enseignants, que non ! L’informaticien de formation préfère encore et toujours les manifestations violentes et spontanées de la parole éructante symbolisée par l’insulte à l’idéal démocratique du débat argumenté. Dans un discours inutilement belliqueux, le voilà, à nouveau aujourd’hui, plus agressif que jamais, couvrant son compatriote Tidjane Thiam d’opprobre. Et ce, de la façon la plus gratuite : « arrêtez votre affaire de Tidjane par-ci, Thiam par là. Dieu nous a donné 32,2 millions d’ha de terre fertile gorgée d’or. Au lieu de trouver parmi nous un homme intègre qui a prouvé qu’il aime ce pays, vous préférez les imposteurs et les escrocs. Et si le messie ne vient pas » ?

Un tel propos, normalement, aurait provoqué scandale ou, à tout le moins, polémique. Et c’est peut-être ce que recherche Gnamien, à défaut d’un vrai succès politique. Mais, passons !

A vrai dire, pour qui connait Tidjane Thiam, son parcours, et pour qui sait ce que c’est que d’être major à polytechnique Paris, d’être appelé au redressement de la fortune du Crédit Suisse, à la présidence des conseils d’administration de Kering, du Rwanda Finance Limited pour développer et promouvoir le Centre financier international de Kigali, pour ne citer que ces exemples, il faut regretter que Gnamien Konan se soit placé en mode un peu badin de la gaudriole. On peut imaginer que Thiam lui-même a lu de telles fariboles avec un intérêt amusé.

Pour être un peu plus sérieux, la seule grille de lecture que nous offre le pamphlet de l’informaticien c’est qu’il plaide pour lui-même. Seulement son approche est mauvaise, il s’y prend très mal. L’homme se rêve un destin de président de la République de Côte d’ivoire. C’est une aspiration légitime. A-t-il, cependant, le physique de son destin ? C’est une autre question à laquelle lui seul peut répondre. Toutefois, puisqu’ils sont désormais nombreux à rêver, on est peut-être dans le commencement de la réalité.

Cela dit, il convient de le rappeler à Gnamien Konan, la réalisation de ce noble objectif, si tant est que c’est le sien, requiert avec constance une posture d’élégance vis-vis des autres. Et surtout la mise sur pied d’un appareil politique très solide. Pour ce qui le concerne plus précisément, le besoin se résume à un travail acharné et soutenu qui lui permettrait de positionner plus  confortablement son parti politique, « Union pour la Côte d’Ivoire », dont l’audience, encore très confidentielle, oscille actuellement autour de 0,37 %, depuis l’élection présidentielle de 2010. C’est donc dire qu’à l’instar d’autres formations de l’échiquier politique national, « Union pour la Côte d’Ivoire » est la faiblesse de l’opposition. Bien entendu en raison de la taille démographique de ce parti, comme montré plus haut, mais, également, parce qu’en tant qu’ancien membre du gouvernement RHDP, son président n’est guère légitime à critiquer Ouattara dont il reste, à maints égards, comptable de la gestion.

Le combat de Gnamien Konan, pour être à la hauteur de ses aspirations présidentielles, est donc, avant tout, celui de la crédibilité, ensuite celui de l’agrandissement et de l’enracinement de ses bases militantes. Il ne s’agit point de se déployer à travers des cantiques de l’injure facile. L’invective n’est pas une modalité argumentative, elle ne saurait non plus être un outil de communication politique efficace. Elle traduit simplement une absence de vision.

Ceci étant dit, il faut rappeler que Tidjane Thiam n’a vraiment jamais exprimer son désir d’être président de la République de Côte d’ivoire. Son approche, en général peu exubérante, procède peut-être d’une stratégie de conquête du pouvoir politique. Chose parfaitement raisonnable et légitime. Toutefois, lui-même n’a laisser transparaître autre chose que sa seule solidarité du combat de l’opposition face au troisième mandat d’Alassane Ouattara. Tidjane n’a pas non plus caché son travail de l’ombre dont s’il s’est d’ailleurs réjouit des fruits lors de son dernier passage sur TV5 monde. Son intérêt pour le débat politique ivoirien actuel, son attente pour le pays n’est nullement d’apparaître comme le messie, mais plutôt d’apporter sa contribution à la prévention des conflits intercommunautaires artificiellement montés en Côte d’ivoire et qui ont pour corollaire le crime gratuit.

Jean Clotaire Tétiali