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APRNEWS : Quelles maladies peuvent influer sur la prise de poids ?

APRNEWS - Quelles maladies peuvent influer sur la prise de poids ?
Dimanche, 5 novembre 2023

APRNEWS : Quelles maladies peuvent influer sur la prise de poids ?

APRNEWS - Prendre du poids ne doit pas être pris à la légère. En effet, cela peut cacher un véritable problème de santé et être directement associé à une pathologie sous-jacente, bien souvent endocrinienne et/ou à un traitement médical. Le point avec Jean-Michel Lecerf, médecin spécialiste en endocrinologie, maladies métaboliques et nutrition.

Prise de poids rapide et maladies (endocriniennes, liées aux hormones, auto-immunes…) , de quoi parle-t-on ?

Le syndrome de Cushing

Relativement rare, le syndrome de Cushing, dû à l’hypersécrétion par les glandes surrénales de cortisol, est une des causes classique mais très rare de prise de poids" exprime le médecin Jean-Michel Lecerf. Et même si cette pathologie se soigne relativement bien grâce au dépistage par dosage hormonal, il faut avouer que cette maladie a des conséquences assez disgracieuses sur le corps : prise de poids dite "tronculaire" (localisée sur la partie haute du corps), visage gonflé, rougeurs…

Le syndrome des ovaires polykystiques

Ce syndrome est un trouble anormal chez la femme et peut s’accompagner d’un ou plusieurs symptômes tels que l’hyperpilosité, une aménorrhée ou un trouble des règles. "La prise de poids est quasi constante et principalement localisée au niveau abdominal" détaille le Dr Jean-Michel Lecerf, spécialiste en endocrinologie. "Un traitement hormonal accompagné d’un rééquilibrage alimentaire seront indiqués en cas de diagnostic avéré. »

Un dérèglement de la thyroïde fait-il grossir ?

« Oui et à l’inverse de l’hyperthyroïdie, qui fait perdre du poids ; l’hypothyroïdie s’accompagne assez souvent d’une prise de poids du fait du ralentissement du métabolisme, qui facilite une accumulation de graisse et d’eau dans le tissu adipeux » détaille le Dr Jean-Michel Lecerf. « Pour des raisons plus ou moins évidentes (prédispositions génétiques…), les problèmes de thyroïdes touchent 5 fois plus les femmes que les hommes » complète le médecin.

Les maladies génétiques

« Certaines maladies génétiques, assez rares, comme le syndrome de Prader-Willi peuvent donner un excès de poids chez l’enfant » ajoute le Dr Jean-Michel Lecerf. La prise de poids s’associe au fait que l’enfant a presque tout le temps faim. Le médecin ajoute : « De même, la trisomie 21 peut être associée à un excès de poids. »

Quel cancer est plus fréquent en cas d’excès pondéral ?

« Il y en a plusieurs. Chez la femme, on peut par exemple citer le cancer de l’endomètre ou du sein (après la ménopause) ; et chez l’homme, celui de la prostate principalement. Chez les deux sexes, confondus celui du colon, rectum et du pancréas » précise le Dr Jean-Michel Lecerf.

Les traitements médicamenteux qui influent une prise de poids

Au-delà des maladies qui influencent directement une prise de kilos, il faut aussi aborder les pathologies dont c’est le traitement médicamenteux qui agit sur la prise de poids.

Les corticoïdes

"Lorsqu’ils sont prescrits à forte dose durant plusieurs semaines ou mois, les corticoïdes induisent fréquemment une prise de poids chez les patients : rétention d’eau gonflement du visage… " Ce traitement aux effets indésirables est toutefois et souvent l’option la plus indiquée pour soigner certaines maladies inflammatoires comme la polyarthrite ou la maladie de Horton…)" illustre le Dr Jean-Michel Lecerf.

Les neuroleptiques

Les neuroleptiques, indiqués chez des patients souffrant de schizophrénie, de troubles bipolaires ou de psychose hallucinatoire, peuvent être associés à une prise de poids parfois très élevée, pouvant aller jusqu’à 15 kilos. En cause : modification du métabolisme de base provoquant une envie de goût sucré (sodas, gâteaux…) " détaille le Dr Jean-Michel Lecerf. " Dans bien des cas, ces traitements lourds et à fortes doses seront toutefois indispensables pour stabiliser et guérir ces troubles fortement invalidants pour le patient" nuance le spécialiste médical.

Les antidépresseurs

Ces premiers sont à distinguer des neuroleptiques puisqu’ils seront principalement prescrits pour traiter la dépression. Parmi les antidépresseurs pouvant faire grossir, on peut citer les antidépresseurs dits « imipraminiques » (amitriptyline, doxépine, imipramine…) et les antidépresseurs dits « tétracycliques » (miansérine…). Et si dans bien des situations, il sera difficile de s’en passer, pouvoir parler avec son médecin de suivi de ces éventuels effets indésirables sur le poids permettra d’en modérer le dosage et d’ainsi en limiter la prise de poids.

À cette liste de médicaments pouvant avoir une répercussion sur la prise de poids, ajoutons et dans une moindre mesure, certains antihistaminiques ou traitements indiqués chez la femme comme les progestatifs de synthèse mais aussi l’insuline ou les sulfamides dans le cadre d’un diabète. « L’antibiothérapie répétée chez le nouveau-né/nourrisson serait aussi un facteur de risque de surpoids et d’obésité ultérieurs, en interaction négative avec la césarienne en raison de modification du microbiote » complète le Dr Jean-Michel Lecerf.

La ménopause et la prise de poids : un cas à part

Si la ménopause n’est pas une maladie au sens strict du terme mais tout simplement un mécanisme naturel de vieillissement chez la femme, il est important d’en rappeler son lien avec une prise de poids. « Celui-ci s’explique principalement par la modification corporelle avec une diminution de la masse graisse et à une modification de la répartition du tissu adipeux au profit du tissu adipeux abdominaux-viscéral » détaille le médecin Jean-Michel Lecerf. Il ajoute en nuançant : "La prise de poids à la ménopause n’est pas une fatalité pour autant. Sa prise en charge doit comporter une incitation à accroître l’activité physique et des conseils alimentaires. Les régimes sont déconseillés par contre il faut réaliser des changements à petits pas. »

Comment perdre les kilos liés à une pathologie ?

"Quelqu’un soit la cause (maladie du métabolisme, prise de médicaments, suralimentation….), des kilos installés durablement dans le temps seront toujours plus compliqués à déloger » met en garde le Dr Jean-Michel Lecerf. Il explique : "En effet, le tissu adipeux devient inflammatoire et il devient alors plus difficile d’inverser la courbe de poids. L’obésité en est l’exemple le plus parlant, avec la difficulté d’en sortir une fois pour toutes." Les risques de récidives sont en effet nombreux et cette maladie chronique est d’ailleurs classée comme épidémie mondiale. L’OMS (Organisation Mondiale de la Santé) rappelle d’ailleurs sur son site internet qu’à l’échelle mondiale, le nombre de cas d’obésité a presque triplé depuis 1975 (source 1).

N’oublions pas non plus qu’une prise de poids est associée à d’autres facteurs parmi les plus courants :

Sans oublier, un manque d’activité physique qui explique dans bien des cas un surpoids ou une obésité.

Les facteurs épigénétiques et le microbiote : « Certains évènements extrêmement précoces in utero, à la naissance et dans les premiers mois de vie (stress, suralimentation, carences chez la maman…) influencent le microbiote de l’enfant. Et on sait que le microbiote est un facteur probablement important dans le gain de poids et/ou l’inflammation de bas grade associés au surpoids » détaille le médecin » indique le Dr Jean-Michel Lecerf.

  • Le mode d’accouchement : « L’accouchement par césarienne est un facteur de risque de surpoids et d’obésité ultérieurs pour l’enfant qui impliquerait une modification du microbiote transmis par la mère au nouveau-né » détaille le Dr Jean-Michel Lecerf.
  • Les facteurs génétiques sont aussi une explication à un excès pondéral chez les individus,
  • Les évènements de vie : agressions sexuelles, inceste, décès, divorce, licenciement, arrêt de tabac… sont autant de raisons pouvant expliquer un déséquilibre pondéral,
  • La question du stress, mauvais sommeil, la question du rythme de travail (horaires de nuit)…jouent aussi un rôle dans la gestion du poids,
  • La mauvaise alimentation dont les produits « ultra transformés » sont d’ailleurs accusés par certains chercheurs d’être de véritables perturbateurs endocriniens.
  • Entretien réalisé avec le Dr Jean-Michel Lecerf, médecin spécialiste en endocrinologie et maladies métaboliques, aussi auteur de plusieurs ouvrages dont « Le surpoids, c’est dans la tête ou dans l’assiette » et plus récemment « 40 Idées fausses sur les régimes », toujours aux éditions Quae.

    Source 1 : « Obésité et surpoids », 2020, OMS