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APRNEWS : Les pandas, le "soft power" chinois face aux tensions croissantes avec l'Occident

Les pandas, le "soft power" chinois face aux tensions croissantes avec l'Occident
Mardi, 25 juillet 2023

APRNEWS : Les pandas, le "soft power" chinois face aux tensions croissantes avec l'Occident

APRNEWS - Le premier panda géant à être né en France, il y a cinq ans retourne mardi dans le pays auquel il appartient, la Chine, après avoir été prêté au zoo de Beauval dans le cadre du programme international de "diplomatie du panda". Un programme permettant à la Chine de sceller ou d'améliorer des relations diplomatiques avec d'autres pays. Mais les tensions entre gouvernements ou le coût pour le pays hôte pèsent parfois plus que la mignonnerie de l’animal.

APRNEWS - Yuan Meng s'en va. Le Zoo de Beauval (Loir-et-Cher) fait ses adieux, mardi 25 juillet, à l'une de ses vedettes – le premier panda géant à être né en France, il y a cinq ans. L'animal doit participer à un programme d'élevage dans la province chinoise du Sichuan. Bien que celui-ci soit né en France, il est une propriété chinoise prêtée au zoo dans le cadre du programme international de "diplomatie du panda" de Pékin.

Les parents de Yuan Meng, Yuan Zi et Huan Huan, sont arrivés de Chine en France en 2012, prêtés au zoo de Beauval dans le cadre d'un programme de conservation chinois visant à faire naître des pandas dans le monde entier afin de sceller ou améliorer des relations diplomatiques avec d'autres pays.

L'équipe de Beauval a mené la mission à bien : après Yuan Meng en 2017, les jumeaux Yuandudu et Huanlili ont suivi en 2021. 

En plus d'augmenter les effectifs de leur espèce "vulnérable", les pandas ont renforcé l'intérêt pour ce zoo situé dans le centre de la France. L'année de l'arrivée de Yuan Zi et Huan Huan, le nombre de visiteurs a doublé pour atteindre plus d'un million. En 2022, ils ont atteint les 2 millions. 

"Les pandas nous ont donné une identité. Aujourd'hui, nous sommes le zoo où l'on peut voir des pandas", a déclaré Samuel Leroux, directeur des opérations de Beauval, à France Bleu.

Une situation commune aux 22 zoos d'Europe, d'Amérique du Nord et d'Asie qui accueillent actuellement des pandas chinois. Nombre d'entre eux misent sur la popularité des animaux en organisant des cérémonies d'accueil extravagantes, des célébrations d'anniversaires et en mettant à la disposition des fans des caméras fonctionnant 24 heures sur 24.

Mais les pandas ne sont pas seulement populaires auprès du public. "L'obtention d'un panda est généralement considérée comme un coup diplomatique", explique Kerry Brown, directeur et professeur du Lau China Institute au King's College de Londres.

Symbole de douceur et d'amabilité  

Il peut également être difficile, voire "diplomatiquement dommageable", selon Astrid Nordin, également professeur au Lau China Institute, de refuser de se voir offrir un panda.

Au début de l'année, un zoo finlandais a envisagé de renvoyer ses pandas géants en Chine, mais a depuis décidé de les garder.

En effet, les pays d'accueil paient généralement une redevance annuelle d'un million de dollars par couple de pandas, somme qui est ensuite réinjectée dans les efforts de conservation de la Chine. Les prêts peuvent durer jusqu'à 15 ans, après quoi les pandas doivent retourner en Chine. 

Si un panda meurt durant le prêt, des pénalités doivent être payées. Lorsqu'en 2023, Lin Hui, panda âgé de 21 ans, est mort d'une insuffisance organique multiple au zoo de Chiang Mai (Thaïlande), les autorités locales ont déclaré qu'elles étaient responsables d'un versement de 15 millions de bahts (435 000 dollars) à la Chine au titre de l'assurance.

Selon Astrid Nordin, le modèle du prêt est "une façon intelligente" de demander aux pays d'accueil d'assumer la majorité des coûts liés à l'entretien et à la promotion d'un symbole bien-aimé de la culture chinoise. Un système similaire est utilisé pour les instituts Confucius, tel que celui hébergé par l'Université Paris Cité, qui gèrent de prestigieux programmes éducatifs et culturels chinois.

Si le philosophe Confucius incarne l'idée de la sagesse chinoise, les pandas, eux, véhiculent une image plus ludique. En plus d'être grands et forts, ils sont joyeux, mignons et inoffensifs.

En France, les pandas sont arrivés à la suite d'un accord visant à fournir à la Chine de l'uranium pour la production d'énergie nucléaire.

"Une partie du message véhiculé par la Chine autour des accords commerciaux est qu'il n'y a pas lieu d'avoir peur des investissements chinois", explique Astrid Nordin. "Le panda complète très bien ce message en ce sens qu'il incarne l'amabilité et la douceur."

Puissance partenaire et source de problèmes 

La Chine a commencé sa politique de diplomatie du panda, il y a plus de cinquante ans, alors qu'elle jouait un rôle très différent sur la scène internationale. À l'époque, les pandas étaient donnés plutôt que prêtés. Ainsi, nombre de pandas géants n'appartenant plus à la Chine vivent actuellement dans des zoos au Mexique et à Taïwan.

Désormais, en tant que superpuissance économique, "la Chine peut susciter l'admiration et le respect des autres, ce qu'elle ne pouvait pas faire lorsqu'elle a commencé la 'diplomatie du panda' dans les années 1970", explique le professeur Steve Tsang, directeur de l'Institut de la Chine à l'université SOAS de Londres.

L'essor de la Chine, aujourd'hui plus puissante et influente, a rendu ses relations internationales beaucoup plus complexes, en particulier avec l'Occident.

"Dans de nombreux pays qui ont reçu des pandas et des instituts Confucius, on a assisté à une évolution vers une rhétorique beaucoup moins amicale à l'égard de la Chine et moins encourageante pour l'engagement", explique Astrid Nordin.

En atteste le retour en avril du panda Yaya prêté aux Etats-Unis en 2003. De soft power, l’animal inoffensif et mignon est devenu révélateur des tensions entre Pékin et Washington. Les États-Unis définissent désormais la Chine comme un "partenaire commercial majeur" et une source de "problèmes économiques et de défense".

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